Le motif du "chat" chez Séchas (entendez "ses-chats") venu du dessin (des-seins), est l'amorce plastique, érotique, d'une radicale désolidarisation de la condition dépressionniste actuelle. Au croisement Marx-Lacan, c'est-à-dire à la source des flux de l'économie libidinale des signes, désormais largement sous contrôle narcotique, le parc humain des chats de Séchas opère une irrésistible, imprévisible, subversion des codes culturels. S'il n'y a plus de politique possible et par extension, plus d'art hors de son champ délimité et exclusif, c'est vers l'idée deleuzienne du devenir-animal que se tourne Séchas pour une esthétique du jeu des mots et des corps : la réappropriation du Désir extorqué par le capital-spectacle. À la question : qui détient le Phallus aujourd'hui, l'objet idéal, symbole lacanien du manque? Lui ou Elle? Le chat ou la chatte ? Lacan avait répondu en son temps, c'est Personne : ni Lui, ni Elle, ni l'Homme ni la Femme, ni le Pouvoir ni la Puissance. Mais si personne ne détient plus le Phallus aujourd'hui, c'est qu'en réalité il a été confisqué par la sphère séparée du spectaculaire intégré : tout le monde désormais, filles et garçons, hommes et femmes, communautés sexuelles ou groupes ethniques, en petits chats piteusement castrés par l'Empire et le capital spectaculaire. Et hop vous n'avez rien vu, mais vous ne savez plus désirer autrement qu'en animal de compagnie, sous le regard bienveillant des crèches sécuritaires et des garderies du contrôle social. Plus inquiétant encore, vous le niez, vous croyez toujours détenir ce phallus et pouvoir désirer librement dans le lock-out virtuel du narcissisme somnambulique. C'est l'ère du phallus manquant (Lacan) désormais virtualisé, aseptisé, exproprié par le Spectacle que Séchas illustre comme un devenir animal régressif, infantilisant et proprement inhumain (l'échec manifeste de l'Anti-Oedipe deleuzien). Le temps du phallus inversé, de la société-sans-père (ni mère), confisqué par la Matrice spectaculaire (celle du film Matrix si vous voulez) qui vous englobe dans l'artificialité programmée du désir, son vaste ventre doux, sa permissivité inutile et son flot d'images anxiolytiques qui se confond avec votre air dépité de chaton abandonnique. Les Chats de Séchas, on a certainement beaucoup à apprendre d'eux puisqu'il faut reconsidérer l'action politique sous l'angle du Désir (lacanien-deleuzien). Inutile d'essayer de tuer un père introuvable ou de baiser la grande matrice qui nous étouffe, il faut assumer un nihilisme subversif, joyeux, qui sorte le désir de son état somnambulique et dépressionniste. Alors l'art de Séchas et ses chats : comment ça va et vient entre le Désir de l'artiste (toujours vivant lui, croyez-moi) et le Désir social confisqué par les images du spectacle ? Disons que ça va plutôt mal, ça ne circule plus guère ou juste encore sous la forme narcotique d'un vide qui glisse sur des rails en boucle de la solitude narcissique et du contrôle des corps inhabités. Fuck donc ! Il y a une radicalité punk là, hautement musicale qui s'expose et ne se représente pas un événement plastique en forme de bombe à retardement : le chat-cadeau que nous tend Séchas.
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